La permaculture et la bouillie bordelaise
A l’heure où l’on préconise la
production potagère avec le minimum de travail du sol pour ne pas ‘’perturber’’
la vie biologique du sol, on peut se poser la question de l’utilisation de
produit phytosanitaire. La bouillie bordelaise (composée de sulfate de cuivre) fait
partie de cette famille. C’est un fongicide de contact (il ne pénètre pas dans
la plante) ne contenant pas de matières actives de «synthèses» mais c’est un
fongicide quand même. De ce fait, elle est tolérée en agriculture biologique,
mais est-elle inoffensive pour l’environnement ?
Son efficacité est indéniable et
peut-être même qu’elle est trop efficace. Son efficacité ne s’arrête pas à la
destruction des champignons responsables des maladies cryptogamiques redoutées
des jardiniers.
A l’heure où l’on recommande le non
retournement et la couverture permanente du sol pour ne pas détruire et
favoriser la flore et la faune et conserver la précieuse fertilité de notre sol,
doit-on utiliser ce produit considéré comme le produit miracle par bon nombre
de jardinier. Bien qu’appliquée sur le feuillage, la bouillie bordelaise, (produit
de contact) va inévitablement se retrouver au sol par le lessivage par la
pluie, sauf pour la partie que vous récoltez avec vos fruits et légumes.
Pour augmenter l’accrochage sur les
feuilles, utiliser des adjuvants comme l’huile de colza, le lait, le savon
noir, etc.
Comme
c’est un produit très stable, il va donc s’accumuler dans le sol et son
efficacité se poursuit là où il est arrivé. C’est tout le complexe
d’échange qui va s’effondrer et diminuer progressivement. C’est
ainsi que la bouillie bordelaise participe à destruction de la vie du sol en
détruisant la flore du sol (champignons). Si certains sont néfastes aux
cultures, d’autres sont extrêmement bénéfiques aux cultures, notamment lorsqu’ils
forment une symbiose avec les plantes. Certains champignons s’associent aux
racines des plantes et créer ainsi un complexe d’échange que l’on appelle
rhizosphère. En échange d’un peu de nourriture fournie par la plante, ce
champignon va lui permettre d’atteindre des ressources inexploitables par elle-même.
C’est par l’intermédiaire du mycélium (système racinaire très étendu du
champignon) qu’il va fournir cette nourriture.
Alors a-t-on le droit de détruire ainsi
la flore que l’on essaie de préserver par ailleurs ?
Que faut-il penser du trempage des
plants de tomates dans la bouillie bordelaise avant la plantation ou encore de
l’arrosage de ces mêmes plants à la bouille bordelaise ?
Je vous laisse le soin de juger de vos
pratiques mais vous comprendrez pourquoi il est recommandé d’effectuer quatre
traitements maximum par an avec ce produit. Le respect de la dose homologuée est
la règle (2 g maxi/m²). Tout surdosage ne sert à rien et n’augmente pas
l’efficacité de votre intervention.
Les autres formes de cuivre
(oxychlorure) ont le même comportement et se retrouveront également au sol.
N’oubliez pas notre charte : ‘’Jardiner au
naturel, çà coule de source.’’ Une rotation longue des cultures (au
moins 3 ans), une bonne fumure avec du compost ou du fumier sont des gages de
réduction des problèmes phytosanitaires.
Gilbert COURANT
Publication du N° 523 de la revue trimestrielle du
jardinier sarthois